Pourquoi nos ami·es peuvent aussi être les amours de notre vie ?
Amouritié for the win
Décla’ d’amour à nos BFF, éloge de la déconstruction, envie de se dire que dans un monde différent on pourrait aussi organiser des grosses teufs en mode mariage pour célébrer nos amitiés de longue date... On ne saurait trop dire ce qui a motivé l’écriture de cet article - sans doute un peu de tout ça en même temps. Alors que ce soit dit : l’amitié, ce n’est pas moins bien que de l’amour, C’EST de l’amour. Ci-joint quelques idées à vous mettre sous le coude pour questionner cette éternelle pression sociale qui semble accorder plus d’intérêt à l’amour romantique qu’à nos amitiés en tous genres.
#1 : Parce que le couple n’est pas le nombril du monde
Do you know l’amatonormativité ? Inventé par la professeure de philo Elizabeth Brake, ce terme dénonce le fait que les relations romantiques soient considérées comme naturelles (et donc hautement souhaitables) pour les êtres humains. C'est une critique de la norme qui voit le couple et les relations romantiques comme supérieures aux autres modes de relations entre les personnes.
La norme étant ce qu’elle est, c'est-à-dire dominante, elle s’appuie sur un système, tentaculaire et puissant. Cf les innombrables articles sur « comment trouver l’amour », « comment faire durer son couple » ou « comment faire tomber X ou Y amoureux·se de vous »... Et les injonctions qui assimilent le célibat à une forme d'échec social.
En fait, l’idée que nous devons « nous réaliser » à travers nos relations amoureuses est si forte qu’il est même rare qu’on la remette en question. Marre d’entendre des potes bien entouré·es se considérer comme seul·es parce que « pas en couple » ? Ouais, nous aussi.
#2 : Parce que nos amitiés ne comptent pas pour du beurre
L’idée n’est pas de dire que le couple est une hérésie et que l’amour romantique ne sert à R : on peut tout à fait s’y épanouir, vous-même vous savez.
Le problème, c’est plutôt qu’à force d’encenser l’amour romantique et les relations de couple (souvent hétéros et monogames qui plus est), on a tendance à considérer nos amitiés comme moins importantes. Sur une échelle de 1 à 10 du « j’ai une vie sociale épanouie », la relation de couple est à 10, tandis que la famille, les ami·es, et les autres flottent en dessous. Tant et si bien que l’on considère souvent comme normal de s’éloigner de ses ami·es quand on se met en couple ou qu’on se marie (le fameux « ah nan mais on ne voit plus Gisèle en ce moment, tu comprends, elle est amoureuse »).
Bien sûr qu’on ne lui en veut pas à Gisèle, ça peut arriver à n’importe qui d’avoir envie de mettre son tél en mode avion pendant 6 mois pour se rouler dans sa couette avec son/sa/ses nouveau·elle·s partenaire·s. Mais Gisèle, comme tout le monde, devrait avoir le choix de faire de ses amour·s ou de ses ami·es sa priorité. Selon ses besoins et/ou ses envies du moment.
Et peut-être même que Gisèle devrait avoir le droit de claquer 5000 balles dans une grande fête avec une pièce-montée pour célébrer son amitié de 20 ans avec Henriette. Tout en refusant de se marier avec son mec. Y a quoi ?
#3 : Parce que pourquoi hiérarchiser nos relations ?
Ce qui pose problème dans toute cette histoire, c’est bien la hiérarchisation. À force de considérer que certains modes de relation sont plus importants que d’autres, on finit par oublier que nos relations ne sont pas là pour se conformer à une norme, et que nos relations n’ont d’ailleurs pas de but en soi. Si ce n’est celui de nous faire du bien et de nous faire grandir.
D’ailleurs, l’amitié peut tout à fait être le ciment d’une relation romantique, et une relation romantique peut se transformer en amitié.
Un autre terme qu’on aime beaucoup pour mettre cette idée en valeur ? L’amouritié. Inventé par le philosophe Henri-Frédéric Amiel au XIXème, l’amouritié peut se définir comme « un sentiment ambigu tenant à la fois de l'amour et de l'amitié ». Pour lui, l’amouritié est « ce que chacun sent confusément : il n'y a pas d'amitié sans une forme d'amour, pas d'amour durable non plus sans que ne s'y adjoigne un peu d'amitié ».
Au final, la norme qui enserre nos relations amoureuses est si forte qu’elle les rend souvent douloureuses (kikoo les ruptures, le ghosting et le reste). D’où l’urgence de rebattre les cartes de notre rapport au couple, et de trouver de nouvelles définitions de ce que peuvent être des relations épanouissantes. Qu’elles soient amicales, amoureuses, ou sexuelles. Ou un peu des deux, un peu des trois, pas tout le temps ou en même temps. Tant qu’elles nous conviennent.
#4 : Parce que nos ami·es sont peut-être bien nos âmes soeurs
Âme sœur : pas quelqu’un·e qui nous sauve, mais quelqu’un·e qui croit en notre capacité à nous sauver nous-même. Voilà une définition de l’amour qu’on aime bien. Une définition qui peut tout aussi bien coller à nos relations romantiques qu’à nos relations amicales. Une définition, surtout, de ce que peut être une relation saine, en dehors de toute volonté de la faire entrer dans une case. En dehors de toute cette quête qui voudrait que l’on trouve à travers nos relations amoureuses quelqu’un·e qui nous complète, qui nous sauve, qui donne un sens à notre vie.
Ce qui nous donne envie de vous partager les mots de Nanténé aka @feministangst à ce sujet : « L’amitié est la grande oubliée dans le panel des relations. Pourtant, plus je grandis, plus il me semble que c’est dans les relations d’amitié menées à bien – et, donc, qui embrassent pleinement les notions d’intensité, de loyauté, de temps donné et de temps partagé – qui se rapprochent le plus de ma définition de ce que c’est, être amoureux. »
Alors on vous pose la question : c’est quoi être amoureux·se ? C’est se soucier de celleux qu’on aime, leur donner du temps, être là pour elleux comme on peut, leur donner de l’amour, du soutien, désirer la présence de ces personnes à nos côtés pour toute la vie ? Si c’est ça, alors c’est sûr : nos ami·es sont sans aucun doute (aussi) les grands amours de notre vie.