City Guide : Kiff à Tanger
Much needed
Port de commerce pour les Romains, terre d'accueil de la résistance pendant la Seconde Guerre mondiale ou terrain de jeu des poètes de la Beat Generation, la ville portuaire de Tanger, toute au nord du Maroc, jouit d’une histoire particulièrement riche et cosmopolite. Moins connue que ses grandes sœurs Marrakech ou Casablanca, elle détient une réputation de ville mystique , où de grands noms ont trouvé asile, de Francis Bacon à Allen Ginsberg en passant par Matisse ou Jean Genet. Tournant la page du fantasme sulfureux que les occidentaux ont entretenu à ses dépends, entre drogue, prostitution, « paradis gay », et trafics en tout genre, Tanger bénéficie d’un nouveau souffle culturel. Yallah !
Promenade culturelle
@lesinsolitesofficiel
Avant d’arriver à la Médina et ses boutiques à touristes, de nombreuses pépites sont disséminées dans la ville moderne, à commencer par le quartier espagnol, où se trouve le vieux théâtre Cervantes en reconstruction. Josephine Baker s’y produisait et la magnifique devanture carrelée est encore visible, malgré les travaux. Un peu plus loin, l’hôtel El Muniria apparaît au coin d’une rue, là où William Burroughs a écrit son œuvre « Le Festin Nu ». Quand on remonte le Boulevard Pasteur, épicentre des écrivains, on fait un détour obligé par la librairie des Colonnes, charmante boutique francophone au rayonnement international, qui va d’ailleurs bientôt lancer son prix littéraire. En bas de la rue, sous ses airs de café désuet, on passe devant Le Grand Café de Paris où Jean Genet avait ses habitudes. Un peu plus bas, une autre librairie nous fait de l'œil, Les Insolites, tenue par la française d’origine nord africaine Stéphanie Gaou. On découvre une sélection des dernières nouveautés anglophones et on peut même y boire un thé. Suivez bien la programmation, de nombreuses rencontres avec des artistes y sont organisées. Après un détour par le vieux cinéma Mauritania, on arrive sur la place du Grand Socco. Mythique place ombragée de palmiers, elle accueille au Nord la cinémathèque de Tanger, dédiée au cinéma d’auteur. Au sud, c’est l’entrée vers la Médina.
La médina
@pixiprol
Comme beaucoup de cités orientales, Tanger recèle en son cœur une médina, une vieille ville faite de maisons blanches et d’un dédale de petites rues étroites absolument magnifiques. En partant de la place du Grand Socco, on arrive très rapidement chez sa petite soeur, la Place du Petit Socco, coeur battant de la médina, où le vieux café Tinjis nous propose une terrasse ensoleillée avec toute une carte de boissons et snacks marocains, bons et pas chers. Thés à la menthe, café turc, baghrirs (les fameuses crêpes mille trous), msemen au beurre (ces crêpes carrées feuilletées), jus d’orange pressé… de quoi faire un petit-déj parfait !
Il fait bon se perdre dans les rues étroites pour trouver son bonheur dans les échoppes de produits traditionnels. Si vous cherchez un beau tapis, direction Bleu de Fès, pour des bijoux, étoffes ou vaisselles, c’est dans la boutique de Majid que ça se passe. Pour déjeuner dans la médina, on recommande le restau tradi Kebdani, pour un tajine au poulet succulent, ou plus haut Le Salon Bleu, avec ses kémias, des petits plats à partager entre taboulés, aubergines confites, houmous ou carottes à l’ail. Un peu à l’ouest, le Marocco club régale sur sa terrasse ombragée de sandwichs keftas en journée et couscous le vendredi, puis propose alcool et menu gastro le soir en salle.
Envie de boire un thé au calme ? Rendez-vous au café Baba, lieu iconique où les Rollings Stone venaient fumer du kif (la guitare de Keith Richards est accrochée au mur) et où le film de Jim Jarmush Only Lovers Left Alive prend place. Le rade encore dans son jus est parsemé de photos de célébrités venues boire un thé avec vue sur la ville. Niveau culturel, on recommande le musée de la Légation Américaine, témoin du lien entre la ville et les États-Unis (le Maroc a été le premier pays à reconnaître l’indépendance des USA en 1777). En grimpant les rues, et en admirant au passage la magnifique vue sur le port depuis les remparts, on arrive au musée de la Kasbah. Dans ses murs d’ancien palais, il retrace l’histoire riche de près de 3000 ans de Tanger.
Un peu plus loin
@sortirtanger
En sortant de la médina, on recommande d’aller faire un tour au café Hafa sur la corniche. Tout en hauteur, le lieu mythique se déploie sur une terrasse de six niveaux, pour un petit thé à la menthe face à la mer. De l’autre côté de la ville, une balade, voire une baignade sur la longue plage, permet d’arriver à la somptueuse villa Harris. Dans ces murs richement décorés, on retrouve le musée d’art contemporain de Tanger qui met en avant l’essor artistique local de ces dernières décennies. Pour conclure, si vous avez une voiture, on vous suggère une virée aux grottes d’Hercules, curiosité géologique sur la côte Atlantique.
Hanneli Victoire