Elle a 44 ans, née d’une mère russe et d’un père ukrainien, et jusqu’à récemment elle était journaliste et productrice pour la première chaîne de télévision russe (majoritairement détenue par l’État) Pervi Kanal. Le 14 mars, Marina Ovsyannikova a fait irruption sur le plateau du JT de sa propre chaîne pour manifester contre la guerre en Ukraine en scandant « Non à la guerre ! », une action pour attirer l’attention du monde au-delà des rassemblements anti-conflit dans les rues de Russie, lourdement réprimés et censurés par le gouvernement.

Arrêtée puis relâchée après 14 heures d’interrogatoire, elle a écopé d’une amende de 30 000 roubles (250 €) pour “infraction administrative”, mais risque encore jusqu’à 15 ans de prison lors d’un procès à venir pour non-respect de la récente loi sur la “propagation de fausses informations sur l’utilisation des forces armées russes”, puisqu’elle a utilisé le terme “guerre”. Le Kremlin nie en effet en bloc mener une guerre contre l’Ukraine, à tel point que le gouvernement parle “d’opération spéciale pour libérer l’Ukraine du nazisme” et interdit formellement toute mention des mots “guerre” ou “conflit” concernant cette actualité.

 

La journaliste moscovite a depuis démissionné après 20 ans à la télévision russe, et expliqué son geste dans une vidéo. Elle y définit ce qu’il se passe en ce moment en Ukraine de crime, la Russie de pays-agresseur, et dénonce un seul responsable : Vladimir Poutine. « Mon père est ukrainien et ma mère est russe, iels n’ont jamais été ennemi·es. Notre peuple fraternel peut encore faire la paix ».

Elle y parle aussi de la honte qu’elle ressent aujourd’hui d’avoir participé à la propagande russe pendant tant d’années. Dans une interview pour France 2, elle raconte la censure permanente : « Toutes les consignes viennent du Kremlin et la direction [de la chaîne] donne régulièrement des instructions aux employés sur ce qu’il faut dire. Tout le monde le savait. À tel point que quand le journal commençait, mes collègues s’éloignaient de l’écran et coupaient le son ».

 

Emmanuel Macron lui a offert l’asile mais elle souhaite continuer son combat depuis la Russie, peut-être pour inspirer ses compatriotes, en tout cas pour continuer à porter leur voix. « Je suis une femme russe, normale, qui a décidé d’exprimer sa position de citoyenne ». Un exemple de courage qui méritait bien une présentation.